Le Fort de Vaux
"S'ensevelir sous les ruines du fort plutôt que de se rendre"

Situé au Nord-Est de Verdun entre le fort de Douaumont et le fort de Tavannes, ce fort a été contruit entre 1881 et 1884 en maçonnerie ordinaire. En 1888, le fort est modernisé une première fois : les voûtes de la caserne sont renforcées par une carapace de béton de 2,50 m d'épaisseur isolée des maçonneries par une couche de sable d'un mètre d'épaisseur. Puis de 1904 à 1906, l'armement du fort est renforcé par l'installation de deux 75 mm courts sous tourelle et de deux observatoires cuirassés. Deux casemates de Bourges sont construites et armées chacunes de deux canons de 75 mm sur affut de forteresse. La casemate ouest flanque Douaumont et couvre les ravins de la Fausse Côte, de la Caillette et du Bazil au nord-ouest. La casemate Sud-Est couvre le village et la batterie de Damloup. Pendant cette période les trois caponières sont détruites et remplacées par trois casemates de coffres : un coffre simple Nord-Est, un coffre double et un coffre de gorge. Entre 1910 et 1912 sont creusés des gaines de liaisons souterraines reliant les coffres d'escarpe à l'intérieur du fort. Plusieurs autres galeries reliant la caserne aux autres parties de l'ouvrage. permettant de relier entre elles les différentes parties de l'ouvrage.

En 1914, à la déclaration de la guerre, le fort est armé de 6 canons de 75 mm, de 4 canons revolvers et de quatre canons de 12 culasse. A partir d'août 1915, par application de l'instruction du grand quartier général supprimant la place forte de Verdun, le démantelement de Vaux commence. Les canons des casemates de Bourges sont démontés, seule la tourelle de 75 mm dont le démontage est plus complexe reste en place. Les canons revolvers et les 12 culasse complètement surclassés sont aussi laissés dans les coffres.

Dès le début de l'offensive allemande sur Verdun, le fort est bombardé par des obus de gros calibres. Le 24 février, un 420 mm allemand détruit le local abritant les détonateurs nécessaires à l'amorçage des mines. Le 27, un autre 420 détruit la tourelle de 75. Faute de 75 disponibles, les casemates de Bourges sont rapidement équipées de mitrailleuses.


Plan du fort de Vaux

Au mois de juin 1916, le fort est commandé par le commandant Raynal, un officier du 96e RI, blessé de guerre. Les troupes sont composées de la 6e compagnie (120 hommes) et de la 3e compagnie (120 hommes) de mitrailleuses du 142e régiment d'infanterie, d'une trentaine de soldats du génie, d'une dizaine d'artilleurs, d'une trentaine d'infirmiers, brancardiers et téléphonistes et d'une vingtaine de territoriaux pour les corvées. Soit au total 300 hommes tout au plus. Devant le fort, le terrain est occupé par le 2e bataillon du 142e RI.

Le fort de Douaumont pris, toutes les efforts allemands vont maintenant se concentrer sur le fort de Vaux. Le 2 juin, 4 compagnies allemandes du 39 Infanterie-Regiment protégées par un barrage roulant de leur artillerie, progressent vers l'ouvrage. Les Français se replient dans les coffres. Après un violent corps-à-corps, les Allemands pénètrent dans le coffre Nord-Est et avancent dans la galerie souterraine de liaison. Aussitôt les défenseurs répliquent par une pluie de grenades. Le commandant Raynal fait disposer des barrages constitués d'havresacs dans la gaine de liaison. Au Nord, les attaquants introduisent des lances-flammes dans les créneaux du coffre double obligeant sa garnison à se replier vers la caserne. Le coffre de gorge est lui aussi abandonné. Quelques Allemands s'installent bientôt sur les superstructures du fort, cependant, leur progression souterraine est entravée dans les trois gaines par des barrages de fortune. Les Français sont plus de 600 entassés dans la caserne souterraine. Les combats font rage dans l'obscurité percée seulement par la lueur des liquides enflammés projetés par les lance-flammes allemands. Les corps à corps sont violents dans les gaines étroites (1,70 m en hauteur sur 1,20 m de large). Dès que les Allemands détruisent un barrage, il s'en forme un nouveau quelques mètres plus loin et les attaquants sont de nouveau stoppés à coups de grenades, de baïonettes ou de pelles de tranchée. Dans le fort, la chaleur est étouffante, la soif tenaille les défenseurs car les citernes fissurées par les explosions sont vides. Le 4 juin, les Allemands attaquent par la gaine ouest et progressent par le coffre simple est, repoussent les défenseurs au-delà des WC. Les détachements français en surnombre parviennent à quitter le fort vers 1 h 30 en s'échappant par une fenêtre. Le 6 juin les Allemands repassent à l'attaque mais ne progressent guère. Toutes les réserves d'eau des défenseurs sont maitenant épuisées. A bout, le commandant Raynal et les 250 survivants de la garnison se rendent le 7 juin à 6 h 30. Il quittent le fort par le coffre double où les Allemands leur rendent les honneurs...
 

  La galerie principale du fort après la reconquête
Au moment de la réddition, les Français occupaient la caserne, les deux casemates de Bourges, le barrage du coffre double devant l'observatoire ouest, le barrage du coffre simple Est derrière les WC et le barrage du coffre de gorge au niveau des escaliers. 

 

Occupé par les Allemands, le fort est repris par les Français le 2 novembre 1916. Sa défense est réorganisée, les casemates de Bourges sont rééquipées en 75 mm et l'ouvrage reçoit quatorze mitrailleuses. L'observatoire cuirassé est réinstallé à l'emplacement de la tourelle de 75. Pour faciliter les liaisons avec l'extérieur, un tunnel de communications passant sous l'angle Sud-Est du fort débouche à 150 m de l'ouvrage sur l'emplacement d'une ancienne batterie.
Le fort eut encore à subir le feu de l'artillerie allemande, mais celle-ci ne lui occasionna plus que des dégats mineurs.


Mitrailleuse en position dans le fort de Vaux reconquis

 

Ce ouvrage est ouvert au public, les visites sont payantes. Avant de visiter le fort, une promenade sur les superstructures du fort s'impose. Là le paysage est tourmenté, les fossés de gorge ont été nivelés par le déluge d'artillerie et la caserne n'est plus qu'une masse de béton informe... 
Cependant à l'intérieur les oeuvres vives de l'ouvrage semblent avoir peu souffert des obus allemands et français qui tour à tour se sont acharnés sur le fort de Vaux. Certaines chicanes obstruent encore les gaines de liaison. La visite guidée est très instructive. Un site incontournable lors de la visite du champ de bataille, mais malheureusement assez mal entretenu.

Fort de Vaux : Les casernes côté sud (état actuel)